Les banques, fin de partie?

Entre déserts bancaires, banquiers au bout du rouleau face à une charge de travail de plus en plus grande et l’émergence de néobanques, le système bancaire français actuel aurait-il atteint ses limites?

Les banquiers sous pression

Démissions, non-remplacement des départs à la retraite, pression commerciale, en bref, les banquiers sont à bout. De conseillés, ils passent à agent commercial et atteindre leur objectif devient de plus en plus compliqué. Il faut vendre toujours plus d’assurances, de prévoyances, de crédits à la consommation… et continuer d’attirer de nouveaux clients. Ainsi, 74% estiment avoir une quantité de travail excessive. Et 64% ne disposent pas du temps nécessaire pour faire leur travail correctement, d’après les enquêtes sur les indicateurs des risques psychosociaux (RPS) du SNB/CFE-CGC menées en 2017 et 2021.

La pression commerciale exercée sur les banquiers sert à récupérer les marges perdues suite à la réglementation de certaines commissions, notamment sur les frais d’incidents bancaires, et à la chute des taux d’intérêt qui a rendu le prêt immobilier moins rentable. Cela favorise un mal-être ambiant au sein des équipes.

Résultat

Le devoir de conseil est parfois mis à mal. Les banquiers n’ont plus autant de temps à accorder à leur client pour les conseiller. Un sentiment d’impuissance grandissant et une perte de sens dans leur travail au quotidien se manifestent par une augmentation des pourcentages de démissions sur ces dernières années.

« Le métier ne fait plus rêver. Il y a encore quelques années, il y avait de la fierté à travailler dans la banque. Mais maintenant, ce n’est plus le cas. Les banques ont même du mal à recruter » Frédéric Guyonnet, Président National du Syndicat National de la Banque (SNB/CFE-CGC)

Ainsi, sur l’année 2019, 40% des salariés en CDI ayant quitté leur poste ont démissionné. En 2014, ce motif ne représentait que 25% des départs d’après la dernière étude de l’Association française des banques (AFB).

« En agence, vous n’avez plus de chargé d’accueil, donc c’est aux conseillers de répondre au téléphone et d’accueillir les clients. Il y a des réductions d’effectifs aussi sur des sites centraux, ce qui fait que des activités faites au siège reviennent désormais aux réseaux. Il faut faire le contrôle des ouvertures de compte, la commande des espèces, la gestion des guichets automatiques, en plus de recevoir les clients, sachant qu’un rendez-vous, qu’il faut préparer en amont, dure 1 heure et qu’après le conseiller doit rédiger un compte-rendu » complète Frédéric Guyonnet.

Un sentiment d'abandon et une désertification de l'activité

D’après l’étude d’Infostat marketing, la France a perdu 9% de ses agences en 10 ans. La Fédération bancaire française (FBF) tente de rassurer son monde en déclarant que, ces fermetures ne remettent pas en cause « la proximité géographique qui reste la spécificité du modèle bancaire français », écrit le lobby des banques dans son rapport Banque & Territoires 2020.

« La  respiration » du réseau d’agences suit naturellement l’évolution de la société » nous explique la FBF. Pour appuyer ses propos, elle aborde également des comparaisons européennes. Ainsi, « en France métropolitaine, on dénombre en 2019 près de 7 agences pour 100 kilomètres carrés, comme en 2009. Au sein de la zone euro, sur la même période, ce nombre baisse de 11 à 7 Allemagne, de 11 à 8 en Italie, et de 9 à 5 en Espagne », peut-on lire dans ce rapport.

Mais ces statistiques globales agacent plus qu’autre chose. C’est bien gentil de nous expliquer qu’on s’en sort tout de même mieux que les autres… mais ce n’est pas parce que c’est mieux que ça veut forcément dire que c’est suffisant.

« La France, le Royaume-Uni ou l’Allemagne ont des réalités géographiques bien différentes. La France, c’est 35 000 communes. En Allemagne, c’est 3 fois moins. Il y a certes plus d’habitants mais sur un territoire moins étendu. Donc la population y est plus concentrée qu’en France ». Eric Bocquet, Vice-Président de la commission des finances.

Eric Bocquet, continue en déclarant que la fermeture des agences bancaires encourage un sentiment général d’abandon et de désertification de l’activité économique, notamment dans les territoires les plus ruraux et reculés.

33 départements sur les 96 de France Métropolitaine ont perdu entre 10% et 18% de leurs agences bancaires entre 2010 et 2020 d’après les données d’Infostat Marketing.

C’est donc voiture obligatoire pour se rendre dans une agence bancaire pour les personnes vivant dans des espaces reculés. (C’est vrai qu’avec les problématiques climatiques, c’est bien de multiplier les trajets en voiture et seuls en plus, merci les banques, toujours un soutient face au réchauffement climatique). Mais les grandes villes sont aussi touchées par les fermetures d’agences bancaires, même lorsque celles-ci font partie des territoires les plus dynamiques de France comme Paris et Lyon par exemple.

Et quand ce n’est pas le nombre d’agence qui diminue, le temps d’ouverture peut-être, à son tour, impacté. Postes et agences bancaires bientôt les mêmes galères pour se rendre sur place? Bref, je ne voudrais pas travailler au sein d’une banque dans ces conditions, on comprend donc la « crise existentielle » que traversent les banquiers.

Ça ne vous a sûrement pas échappé, ces dernières années on a vu naître un nouveau type de banques: les néobanques. Ce sont des banques en ligne, issues du numérique, qui proposent des services bancaires, classiques ou innovants, souvent à moindres coûts par rapport aux banques de détail.

Avec l’émergence des néobanques qui challengent notre accès à nos finances et face aux problématiques évoquées précédemment, serait-ce la fin du système bancaire français tel qu’on le connaît?

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